Passée par l’OL et le PSG chez les jeunes avant d’évoluer aux Etats-Unis ces 5 dernières saisons, la gardienne de 24 ans a rejoint le MHSC cet été. Avant la réception de Clermont (D2), ce dimanche à Grammont en 16ème de finale de la Coupe de France (14h30), rencontre avec une jeune femme pleine de vie, au parcours aussi atypique que passionnant
Au fil des minutes, sa timidité s’est estompée et elle a pu dérouler les pages des 24 premières années de sa vie, qui ressemblent déjà à un beau roman bien rempli. Roman ? Romane ? N’y voyez pas de jeu de mots car Romane Salvador préfère qu’on l’appelle Romy : « Je m’appelle Romane sur le papier mais, depuis que je suis née, tout le monde m’appelle Romy et c’est resté dans tous les clubs où je suis passée », sourit la gardienne montpelliéraine, arrivée au MHSC cet été. « Aux USA, ils ne savaient même pas que je m’appelais Romane. J’ai même reçu des trophées où il était inscrit Romy Salvador. Ce n’est qu’en arrivant ici que les gens ont recommencé à m’appeler Romane, et je vous avoue que parfois j’y suis tellement peu habituée, que quand on m’appelle comme ça, je ne me retourne même pas ! » (rire).
Des trophées, Romy en a donc récoltés pas mal aux Etats-Unis, puisqu’elle a été élue à 3 reprises meilleure gardienne de la très relevée ligue universitaire américaine. Un destin aux gants d’or qui aurait pourtant pu ne jamais se dérouler ainsi. En effet, cette cadette d’une famille de 4 filles qui a débuté le foot à l’âge de 6 ans avec les garçons dans le village de Vezeronce Curtin où ses parents résidaient se voyait plus un destin à la Juninho qu’à la Hugo Lloris : « J’ai été recrutée par l’OL à l’âge de 10 ans en tant que numéro 10, raconte-t-elle. La première année, il n’y avait pas de gardienne et on devait aller chacune à notre tour dans les cages. Les entraineurs ont alors trouvé que j’avais des qualités pour évoluer à ce poste. Ils m’ont demandé de faire une semaine d’entraînements spécifiques pour voir si cela me plaisait, et ils m’ont dit que j’avais beaucoup de potentiel et que j’irai loin si je restais à ce poste…. Et c’est ce que j’ai fait. »
Une trajectoire pour le moins surprenante qu’il convient ensuite de requalifier par le terme ascendante. Toujours surclassée dans les catégories de jeunes de l’OL, elle évolue en U19 Nationales dès l’âge de 15 ans, tout en s’entraînant avec les pros le mercredi « Quand tu t’entraînes avec Sarah Bouhaddi ou Pauline Peyrault-Magnin et que tu as de grandes attaquantes en face de toi, tu acquiers énormément d’expérience et j’ai beaucoup progressé à cette époque-là. » En 2015, elle choisit de rejoindre le PSG, alors qu’elle n’a que 17 ans : « Cela faisait déjà deux saisons que je jouais en U19 et Paris me proposait en plus de devenir troisième gardienne de l’effectif pro, se souvient-elle. J’ai passé deux ans là-bas où je m’entraînais avec les pros toute la semaine. Le week-end, soit je jouais en U19, soit j’étais sur le banc en D1. »
A l’été 2017, Romy choisit de donner une nouvelle orientation à sa carrière : « Je savais que je ne serai plus éligible pour évoluer en U19 et j’avais de telles gardiennes devant moi… raconte-t-elle Je savais que je n’aurai pas ou peu d’opportunités de jouer. D’autre part, les études étaient importantes pour moi, parce qu’on ne sait jamais ce qu’il peut arriver en football et je savais qu’en France, ce serait plus compliqué de concilier les deux ; à l’inverse des États-Unis, où il y a beaucoup plus d’opportunités à ce niveau-là. »
Direction donc Los Angeles et la California Baptist Université où Romane Salvador obtient un Bachelor en marketing 4 ans plus tard, puis un Master en kinésiologie et management sportif. Un programme initialement programmé sur deux ans, mais qu’elle réussit à finir en un an. De ces 5 années outre-Atlantique, Romy ne retient que du positif : « Quand je m’entraînais au PSG, toutes les gardiennes étaient étrangères donc il fallait parler anglais, ce qui m’a permis d’avoir de bonnes bases en arrivant à Los Angeles. En six mois j’étais bilingue... Il valait mieux car tous les cours étaient en anglais ! », rigole-t-elle. « Plus globalement, le changement a été radical. J’étais quelqu’un de très sociable et qui avait besoin de voir du monde… A Los Angeles, j’habitais seule, j’étais loin de ma famille, donc je devais me débrouiller et je me suis redécouvert au niveau de ma personnalité. Je suis devenue beaucoup plus indépendante. J’ai aussi découvert une autre culture, même si je ne me suis jamais sentie étrangère là-bas. J’ai rencontré des gens très avenants ; et quand on est un peu plus timide comme moi, ça aide. »
Sur le plan sportif aussi, tout se passe bien. Les Lancers (surnom des joueuses de son université) ne remportent pas de titre national mais finissent toujours sur le podium de ce championnat à 12 équipes, assorti de playoffs, qui se déroule d’août à novembre. « Durant cette période, tout est très intense car, en plus des études, on joue 2 fois par semaine, détaille Romy. On était tout le temps dans les avions, mais c’était très sympa, parce qu’on avait une très bonne équipe et qu’on s’entendait très bien. Du coup, ce n’était pas un fardeau d’être constamment ensemble, en cours comme à l’entraînement et en déplacement pour les matchs. » Seule étrangère de l’équipe, Romy Salvador est titulaire pendant 5 saisons sans discontinuer et est même élue meilleure gardienne du championnat lors des 3 derniers exercices : « Honnêtement, même si j’ai vécu de très bons moments à Lyon et au PSG, ces 5 années aux États-Unis ont été les meilleures de ma vie. »
Mais alors, pourquoi avoir choisi de revenir en France cet été ? : « Aux États-Unis, tu n’es éligible au championnat universitaire que durant 5 ans et, ensuite, soit tu passes pro, soit tu arrêtes », explique la nouvelle gardienne montpelliéraine. « Je n’ai pas été draftée, j’ai eu quelques touches avec des clubs pros là-bas, mais ça n’a pas abouti. Au départ, je voulais rester aux États-Unis mais je ressentais aussi cette envie de revenir plus près de ma famille, après 5 ans à l’étranger. J’ai notamment un neveu que je n’ai pas vu grandir. »
Malgré son amour pour le pays de l’Oncle Sam, ne croyez pas que venir au MHSC soit un choix par défaut pour Romy… Car dans chacun de ses propos transpirent la volonté de jouer, prouver sa valeur et apporter un plus à sa nouvelle équipe : « Je reste très attachée aux États-Unis, reconnait-elle. Je ne sais pas si mon futur sera ici ou là-bas. Au départ, j’étais très nostalgique, mais aujourd’hui, je me vois rester quelque temps ici. Je savais que le MHSC était un bon club et sans doute le bon endroit pour me relancer et redécouvrir le championnat de France. J’adore cet endroit. Le club est très structuré et le défi sportif très intéressant. »
Cette fan de Manuel Neuer « pour son envergure dans les un-contre-un et la qualité de son jeu au pied », redécouvre aussi le statut de doublure après 5 ans sans s’asseoir sur le banc : « C’est forcément particulier mais je continue à travailler et à faire tout ce que je peux pour gagner du temps de jeu. Je me sens très bien ici. »
Ce sera peut-être le cas ce dimanche en Coupe de France contre Clermont à Grammont (14h30). L’occasion de découvrir le profil de gardienne explosive et véritable boule de nerfs de Romy, qui tranche fortement avec le calme de sa coéquipière Lisa Schmitz : « Je crie beaucoup, je suis très physique et je n’ai pas peur de sortir », dit-elle quand on lui demande de décrire ses qualités, oubliant au passage de mentionner sa grande qualité de réflexes sur sa ligne et son bon jeu au pied.
Côté personnel, cette fan de soin esthétique – « J’adore prendre soin de moi. Que ce soit le maquillage, les cheveux, les ongles, tout ce qui se fait en institut, j’ai appris à le faire moi-même » – reconnait être devenue très solitaire depuis son passage aux USA. Même si elle apprécie de « passer du temps avec des amis », elle reconnait avoir « besoin de son calme, être très indépendante et aimer faire les choses à ma manière. Je vais aussi me balader quotidiennement avec mon chien, un Golden Retriever prénommé Milan. »
De longues balades durant lesquelles elle aime poster des stories – « Je ne suis pas spécialement fan des réseaux sociaux, précise-t-elle. C’est juste ma manière de garder un lien avec ma famille et mes amis des États-Unis et de leur montrer que je vais bien. » – Romy Salvador a sans doute mille fois pensé à ce moment où elle enfilera pour la première fois la tunique montpelliéraine en match officiel. Ce sera peut-être pour ce dimanche : « La Coupe de France est toujours très importante et j’ai cru comprendre qu’elle comptait aussi beaucoup dans l’histoire du MHSC, conclut Romy. De mon côté, j’attends mon tour, et j’espère que cette compétition me permettra de gagner du temps de jeu et pouvoir montrer mes qualités. » Son habileté dans l’exercice des tirs au but (elle a arrêté 2 penalties durant les matchs de préparation), pourrait aussi être un atout supplémentaire pour son équipe… En espérant bien sûr que le MHSC n’ait pas besoin d’en arriver à cette fameuse séance pour accéder aux 8ème de finale…
